Elle cherche des images génératrices d’un effet de réel relativement puissant pour que leur perte de toute référence au monde qu’elles sont censées représenter apparaisse d’autant plus clairement quand, isolées de leur contexte, elles ne résonnent plus qu’avec d’autres images. Les images ne font plus référence à quelque chose qui serait à l’extérieur du monde des images.
Le fait qu’elles n’aient de sens que les unes par rapport aux autres questionne la définition même de l’image. Alors qu’une image, et surtout une image d’actualité, n’a d’existence que par rapport à un autre objet qu’elle représente, ici, le critère de l’image n’est plus d’être adéquate à la réalité, elle a une existence autonome. Les liens entre les images deviennent des liens formels entre les sons, les matières, les odeurs qu’elles évoquent. Les signifiants sont télescopés les uns sur les autres, sans référence aux signifiés.
Marlène Benquet
Sociologue / Directrice de recherche au CNRS
Sociologue / Directrice de recherche au CNRS
dans lequel on veut toujours s’aventurer un peu plus loin et qui ne finit jamais.
Benjamin Abitan
Réalisateur de fictions / Radio France
Les diptyques de Marianne Muller conservent cette double origine en la dénaturant. Le chevalier de Saint-Georges rencontre les Chicago Bulls, la grotte de Lascaux mime une bombe atomique, un morse pose sur sa banquise comme un couple sur une plage. Du plus sacré au plus prosaïque, les images se réveillent en se frottant les unes aux autres. À se rapprocher ainsi, les bienfaiteurs tombent de haut : la poignée de main Mitterand-Adenauer se transforme en structure de porte-container automatisé ; des élus du Var en de frétillants
Comment tiennent ensemble ces couples inquiétants et sympathiques? De quels liens d’amitié, d’amour ou de haine s’agit-il? Une réponse est possible : ce n’est ni l’idée ni le sens qui les rapprochent, ce sont la forme et la couleur. Il y a suffisament de personnalité dans l’inclinaison d’une gueule de loup, l’angle d’un décolleté Marilyn Monroe ou la structure de tomates à la mozzarella pour qu’on puisse arrêter un instant de réfléchir et apprécier la forme pure qui émerge, parfois très lentement, au cours de la confrontation. Les diptyques proposent ainsi une manière de passer, petit-à-petit, de l’ironie à la contemplation, et de la figuration à l’abstraction – avant de revenir au point de départ.”(...)
Clément Calliari
Ecrivain chez Gallimard / Nrf